La maladie du roi

Christian Carisey

Le Cherche Midi

  • Conseillé par
    20 janvier 2014

    Versailles, 1686. La France va mal. La révocation de l'Edit de Nantes entraîne des révoltes en région, les puissances étrangères complotent et dans les îles, les esclaves se rebellent. Si Louvois, ministre de la guerre de Louis XIV, veille augrain, le roi a des préoccupations plus terre à terre. Ses soucis se concentrent sur une infime partie de son anatomie : son anus. Diminué par une fistule anale, le Roi-Soleil souffre le martyr et a du mal à s'intéresser aux affaires de l'Etat. Les courtisans pensent déjà à sa succession et sont enclins à trahir. Tandis que son médecin attitré pratique des saignées à tour de bras, que l'ambassadeur de Siam attend d'être reçu, que les cours européennes dépêchent des espions pour être tenues au courant de la situation, que Madame de Maintenon et le Père La chaise prient avec ferveur, Félix de Tassy hante les couloirs de la Bastille et de l'Hôpital général et s'entraîne sur les condamnés et les indigents pour perfectionner sa technique opératoire et ses instruments chirurgicaux.

    Il a en effet été décidé que le roi serait opéré, il en va de l'avenir du pays. Et Félix sait qu'il n'a pas droit à l'erreur.

    Point de suspense dans ce roman situé en 1686 puisque l'on sait que le Roi-Soleil est mort en 1715, à l'âge canonique de 76 ans. C'est donc avec bienveillance que l'on regarde les hésitations et questionnements du chirurgien Félix de Tassy au sujet de l'opération royale, parfaitement au courant de la réussite de son entreprise. L'intérêt n'est donc pas là mais plutôt dans la formidable leçon d'histoire que nous propose Christian Carisey. Un instantané de la vie de Louis XIV au moment où son règne connait une crise majeure due à ses problèmes de santé. Titubant de son lit à sa chaise percée, le monarque absolu délaisse les affaires de l'Etat et les courtisans en profitent pour créer de nouvelles alliances. Ce petit monde s'inquiète, complote, frétille entre jalousie et flagornerie. Pendant ce temps, le pays s'agite et l'auteur en profite pour nous raconter les querelles qui opposent jansénistes et jésuites, les missions d'évangélisation à l'étranger de ces derniers, les conséquences de la révocation de l'Edit de Nantes. La fistule anale du roi est aussi l'occasion d'évoquer la naissance de la chirurgie moderne qui jusque là était exercée par les barbiers et se débattait contre la méfiance des médecins et de l'Eglise. Le monde des sciences est en ébullition, on remet en question les dogmes, on s'interroge sur l'asepsie, on ne veut plus laisser la vie entre les seules mains de Dieu.
    Peuplée, outre le roi, des grandes figures de l'époque, la Palatine, la Maintenon, Louvois, le Père La Chaise, Félix de Tassy, etc. et de quelques personnages inventés pour pimenter le récit, cette Maladie du roi est une lecture plaisante, vivante et instructive, à lire pour apprendre sans en avoir l'air.


  • 14 septembre 2013

    Une belle découverte

    Dur, dur de vous parler du livre et surtout de vous expliquer de quoi il parle. Car, en effet ce livre s’attache au Roi-Soleil et à sa célèbre fistule… mais pas que ! Ce n’est finalement qu’un prétexte pour nous donner un aperçu de la situation politique en 1686. Le Roi est faible, à l’article de la mort selon certains. Cela ne passe pas inaperçu et les puissances européennes pourraient en profiter pour envahir la France. Le Roi n’a donc d’autre choix que de donner le change, d’espérer mystifier son monde malgré la douleur bien présente en croisant les doigts pour que cela suffise à repousser les menaces les plus immédiates. Toutefois, cela ne peut pas durer éternellement, malgré les risques, il faut opérer le Roi. Cette charge revient au chirurgien Félix de Tassy.

    Le destin de la France est entre ses mains, ce qui va le pousser à multiplier les opérations sur des fistuleux afin de « prendre le coup de main » et apprendre à limiter les risques d’hémorragie et d’infection.

    J’ai beaucoup apprécié ce roman car on sent que l’auteur maîtrise le sujet et colle au plus prés de la réalité historique. De toute façon, en fin d’ouvrage, il démêle le vrai – pratiquement tout – du faux – quelques personnages inventés pour les besoins de l’histoire. À travers ce livre, Christian Carisey nous amène dans les arcanes du pouvoir et nous fait voir l’envers du décor. On s’aperçoit alors que l’équilibre est précaire et que tout peut dérailler d’un moment à l’autre. On croise également de nombreux personnages historiques – Madame de Maintenon, Louvois, le père La Chaise et même le Masque de Fer – et on voit clairement leur influence sur le Roi ainsi que les machinations de certains ou certaines pour arriver à leurs fins.

    Le seul point négatif que je lui trouve, c’est que la chronologie n’est pas précisée de façon explicite. L’action du roman se passe sur quelques mois de l’année 1686 mais il n’y a pas plus d’indications de temps, ce que j’ai trouvé dommage. Cela donne un sentiment de confusion.

    Quoiqu’il en soit, j’ai beaucoup apprécié "La Maladie du Roi". L’état de santé du monarque rend la France vulnérable et c’est parfaitement retranscrit. C’est un roman très intéressant et dont les contextes historique et politique sont complets. Il n’y a que la chronologie qui a posé problème pour moi…